LIAISON EPISTOLAIRE

Ils vont être séparés pour l'été entre le 02/07/1982 et le 24/07/1982. Et s'écrivent en attendant de pouvoir se retrouver.

Ils auront leur premiers émois sexuels du 27 juillet au 30 juillet car elle partira à son tour en vacances le 1er Août. Elle écrit dans son journal intime

le 7 août : J'attends avec impatience des nouvelles de François qui, depuis son départ le 02 août ne m'a pas écrit à moins que sa lettre ne soit en retard. Je patiente donc jusqu'à lundi matin après quoi je craque et l'engueule sérieusement !

Au total il lui aura écrit durant cet été là 8 lettres.

Son journal intime s'arrète là. Rien sur la suite de leur histoire : la reprise des cours, le concert de téléphone , son premier concert, le week-end passé à Orgerus dans la maison de campagne des parents de François. Rien non plus sur leur rupture, le désarroi qui s'est emparé d'elle lorsqu'elle recevra le premier torchon suivi d'une seconde lettre de rupture toute aussi moche 6 mois plus tard. Elle n'a aucun souvenir de la raison de ces deux ruptures, mais en relisant ces lettres elle éprouvera le besoin de continuer le journal intime qui s'était arrêté le 22 septembre 1982 et elle écrira alors :

Lundi 5 août 2013 :

J'ai retrouvé les lettres de François, mon premier amour. en les relisant quelques 31 années après tout m'est remonté en mémoire : toute l'affection mais aussi l'admiration que j'avais pour ce jeune blanc-bec de 19 ans. Ces lettres m'ont fait à nouveau vibrer comme à 18 ans : j'ai ri, pleuré de joie mais aussi de rage. J'avais oublié - et comment est-ce possible? - la dureté de notre rupture. Je hais ces lettres d'adieu. Dommage que je n'ai pas en ma possession mes propres lettres ...

Je n'ai pas arrêté de penser à François tout ce week-end. Dès que j'étais seule j'échafaudais toute sorte de scénarii :

- il a pris 20 kilos

- il est chauve ou les cheveux gris

- il est devenu imbuvable, sûr de lui, sûr de son pouvoir car je ne doute pas une seconde de la réussite sociale de ce garçon talentueux

- Est-il arrogant, macho, coléreux ?

Notre ancienne correspondance me donne l'envie d'une nouvelle : 31 ans après nous devrions avoir quelques sujets de conversation à aborder : fi du passé; qu'as-tu aujourd'hui dans la tête M. François né le .. octobre 1963, à l'aube de tes 50 ans ? Es-tu satisfait de ta vie ?  As-tu des doutes, des révoltes, des angoisses, des envies inassouvies, des phantasmes ? T'arrive-t-il encore de pleurer . Ris-tu chaque jour pour le bien-être de tes zygomatiques ? Aimes-tu ? Es-tu aimé ? Es-tu comblé ou frustré ? Te souviens-tu de moi et si oui quels souvenirs as-tu conservé ? Es-tu un homme d'affaires surbooké, toujours entre 2 avions et que la crise cardiaque guette inévitablement ou pire, es-tu devenu un homme politique qui méprise ses concitoyens ? Si je te retrouve, si je t'écris, qu'elle sera ta réaction ? Jetteras-tu ma lettre à la poubelle comme on se débarrasse d'un détritus ?  La liras-tu jusqu'au bout, te fera-t-elle rire, pleurer, vibrer ?  Et que feras-tu de cette émotion si tu es encore capable de la ressentir ? Auras-tu le courage de me répondre ? chercheras-tu fébrilement au fond d'un grenier à la campagne ma prose de l'époque, si tant est que tu l'aies conservée ? Te poseras-tu toi aussi à mon sujet toutes ces questions ?  Réécriras-tu 10 fois le début de ta lettre comme je pense l'avoir fait dans ma tête ce week-end ?

J'ai pour te retrouver ton nom, une date de naissance et deux adresses de plus de 30 ans ! Je sais également que tu as fait tes études secondaires à ST CLOUD lycée Florent SCHMITT.

Faut-il que je revive mon passé pour pouvoir continuer à avancer à l'aube de ma cinquantaine ? Je suis perdue. Ma vie me semble si creuse et fade ...