Jour J

14/11/2013 16:19

12 octobre 2013, jour J : après la discussion la veille avec François, son époux s'est apaisé. Il a confiance. Sa femme a dérapé mais François va la "recadrer" ! C'est ce qu'il lui a expliqué en substance, plus le fait qu'il fallait faire confiance à sa femme et la lâcher. "Merci François" pense-t-elle.

Elle se prépare avec soin : pas de jupe, mais un jean confortable. Pas de décolleté, un pull qui cache toutes ses formes. Elle se maquille avec attention et choisi le parfum adequa conformément à la nouvelle "Une pause s'impose", enfile un manteau en daim, chausse ses botines assorties et monte dans la voiture. Son époux a tenu à l'emmener jusqu'au RER. Il lui répète qu'il l'aime et qu'il lui fait confiance. Elle est déjà partie ...

Durant le trajet elle écoute sur sa tablette les musiques de GODOG découvertes à l'insue de François. Pas grave, elle adore, en attendant MORRISSEY quelques jours plus tard ... mais cela elle l'ignore encore.

Elle écrit une lettre d'excuse à la femme de François dont elle ignore le prénom. Quelques temps plus tard il lâchera un prénom : Marie-Claire. Erreur fatale n°2 !

Elle lui donnera la lettre et il décidera s'il faut la lui transmettre. Elle s'excuse pour le dernier mail, pour l'avoir ignorée, pour avoir accaparé l'esprit de son époux durant 5 semaines sans même se soucier des éventuels dégâts collatéraux. Mais après tout, elle était là la première ! C'est sa seule excuse.

Il arrive, elle le mate à travers la grille du parc Monceau où ils se sont donnés RDV. Il la repère et ses premiers mots sont "voilà la belle Nadia". "Merci pour le compliment" répond-elle. "Et voilà comment tu me recadres ?", pense-t-elle. Elle a chaud au coeur et ils filent chercher une place, un peu au soleil, sur un banc tranquille. Elle sort son anti-sèche. Il rit : "C'est pas vrai ! Tu triches !" "Non, tu verras que tes initiales ne suffiront pas pour te souvenir ! Moi je prends les devants". Admiratif il lui lance "Qu'elle organisation !". Tu peux te moquer, tu te feras bien avoir un peu plus tard, comme prévu ...

Il se racontent les premiers émois, la perte du père, la rencontre avec sa femme, le voyage en Chine, les amitiés trouvées, perdues, mortes. La vie quoi. Au bout d'une heure environ elle a froid et demande à trouver un café pour se réchauffer. Elle lui prend le bras durant la ballade et ils continuent à parler comme si de rien n'était. Il ne l'a toujours pas "recadrée".

Au café, ils sont face à face alors que sur le banc ils étaient côte à côte. Ca change tout le face à face. Ca oblige à percevoir les émotions sur le visage, à détecter la moindre hésitation, le moindre sourcillement ou sourire en coin. Oui ça change tout, surtout quand il lui confie son secret. Elle a juré de ne jamais rien dire à personne. Motus ! Elle tiendra parole, jusqu'à la mort. Son secret est bien gardé à présent. Elle perçoit sa tristesse, son angoisse, le silence qui noue la gorge, l'empêchant de respirer. Elle voit les yeux humides. Ca la bouleverse mais elle n'a pas le droit de le toucher, ni de le consoler, ni de passer sa main sur sa joue ! RIEN, NE RIEN FAIRE se répète-t-elle ou elle risque de le perdre. Il va la "RECADRER" et elle ne veut pas ! PAS MAINTENANT ! DIS-MOI TON SECRET, pense-t-elle, lâche l'affaire, soulage-toi ! Et il fini par tout lui dire doucement, lentement. C'est court. C'est inhumain, comme les grandes histoires d'amour. Un prénom Eloïse : Elle a failli appeler sa petite dernière ainsi ! Heureusement qu'elle le l'a pas fait, cela aurait brisé François. Parfois la vie est bien faite, pense-t-elle.

Elle doit parler elle aussi : du passé qui la hante depuis un peu plus de 2 mois. Donnes-moi une explication sur notre rupture ! Elle sort son dossier : les lettres de ruptures de François à 6 mois d'intervalle. Il les lit et s'exclame : "J'étais pas fini, un petit con. N'y attache pas plus d'importance que cela". Et puis il enchaîne sur une explication bidon du type "Je les ai toutes quitté comme cela. Je fuyais dès que cela devenait sérieux. Jusqu'à ce que je rencontre ma femme". Ca va, elle connait l'histoire, la rencontre dans le train alors qu'il remonte à Rennes ou Rouen peu importe, la ville où il étudiait à l'époque. Marie-Claire aussi. Et voilà vous ne vous êtes plus quittés ! Super !

L'émotion la submerge. Elle pleure. Il ne bouge pas lui non plus. Il reçoit un coup de fil. Il va falloir se quitter. Elle sait qui a appelé, elle doit laisser la place. Alors elle l'embrasse très vite, tourne le dos et s'enfuit. Il lui a dit qu'ils ne devaient plus se contacter par mail, qu'il en avait marre. C'est fini ! Elle est brisée et puis un trop plein d'émotions pour une seule journée la submerge : c'en est trop ! Elle s'écroule en larmes dans le métro. Tant pis !