Amour quand tu nous tiens !

27/11/2013 04:10

le 26 au soir, j'ai hurlé ma peine à la face de mes proches. Incapable de me contrôler, face à mon mari qui faisait tout son possible pour contenir son effroi et sa peine en gardant son calme, j'ai déversé 15 années de souffrances dans un beuglement assourdissant : j'ai dégueulé à la face de mes amours toute la frustration accumulée, le dégoût de leur égoïsme, de leur indifférence à mon égard, de leur manque de générosité et d'empathie. Mais à quoi pensent ces jeunes gens qui se gargarisent de leurs réseaux sociaux et sont incapables de prendre soin des personnes les plus importantes au monde ? Pourquoi peuvent-ils perdre des heures précieuses de leur existence devant des ânneries à la télé plutôt que d'aider leur mère à la maison ? Rien ne les intéresse dans la vie : ni la cuisine, ni parler avec moi, ni connaître la vie des autres. Elles savent toutes les deux que j'écris beaucoup mais ne m'ont jamais posé de questions sur ce que j'écris mais par contre, mon ainée qui, elle, doit écrire pour le lycée, très fière de son travail réalisé en groupe de 4  sur une fiction, elle, a voulu capter mon attention. J'ai adoré ce qu'elle a écrit d'ailleurs avec l'aide de ses 3 amies, je l'ai félicité et je lui ai posé plein de questions sur le plaisir qu'elle avait éprouvé en écrivant, le principe d'idéation, le plaisir de la création. Mais elle n'a pas rebondit : elle avait eu ce qu'elle voulait ! Capter notre attention, avoir notre approbation sur SON travail ! Toute cette incommunicabilité entre mes filles et moi me ronge : j'ai râté leur éducation, j'en ai fait des monstres d'égoïsme et je n'en peux plus de toute cette frustration, de cette négation des "vieux" que nous sommes ! Je veux qu'elles m'aiment ! Alors je leur crie mon désespoir, je les regarde avec dédain : vous êtes des monstres, vous m'usez, vous profitez de moi, de mon amour, de ma générosité et en retour je n'ai rien. Personne ne fait attention à moi, Personne ne me voit. Je suis toute seule ! Je n'existe pas au sein de cette famille, tout juste bonne à vous nourrir, à vous filer mon fric pour vos exigences vestimentaires qui n'en finissent pas, à entretenir votre linge, la maison, le jardin sans jamais avoir la moindre proposition d'aide. Je nourris les chatttes, je sors le chien , je lave les chiottes en serrant les dents parce que c'est mon rôle, parce que je les ai voulu ces enfants, parce que si personne ne le fait, il faut bien que quelqu'un s'y colle. Je remplis boites de croquettes des chats, je nettoie les deux SDB, je fais la poussière, le ménage, j'étends les 3/4 des lessives toute seule, je ramasse le linge, je le plie ou le repasse, le mets dans les banettes, monte les banettes lourdement chargées dans les chambres des enfants en leur demandant de bien vouloir ranger leur linge. 3 jours après, si je ne râle pas, la banette est toujours dans la chambre. Vidée dans le meilleur des cas, mais descendue au sous-sol où c'est sa place, JAMAIS !

Je leur hurle que ce sera trop tard pour connaître leurs proches, savoir la vie qu'ils ont menée, qui ils sont vraiment, quand ils ne seront plus là. Et en leur parlant de leur Grand-mère qui est seule avec son chien, de leur Papy disparu 6 ans plus tôt qu'elles ont connu mais sans le connaître ou en tout cas sans le voir, sans le questionner, sans rien savoir de sa jeunesse, lui qui a eu une vie si atypique en passant 18 ans de sa vie en Afrique noire, je leur parle de moi indirectement. Savent-elles seulement qui je suis ? Quels sont mes goûts littéraires, quel est le dernier film que j'ai aimé et pourquoi, qu'est-ce que j'aimerais faire si j'avais plus de temps libre, plus d'argent, plus d'amour ?

Et pour une fois, pour la première fois, une fois la tempête passée et tout le monde en larmes, j'ai refusé de m'excuser : le fond était tellement criant de vérité, il fallait tellement qu'elles comprennent. Alors même si la forme n'était pas la bonne, même si ma colère était impressionnante et démeusurée, je n'ai pas à m'excuser de la souffrance que mes proches me font endurer, peut-être sans le vouloir mais tout de même ! Ce discours je leur ai tenu tellement de fois durant ces 15 dernières années : ils sont tous désolées, dans leur petits souliers, dévastés par ma clairevoyance et mon désarroi. Personne ne m'aime parce qu'aimer ce n'est pas faire un bisou et un cadeau à l'anniversaire ou à la fête des mères. Aimer c'est s'oublier pour l'autre, penser au bien-être de l'autre, avoir soif de l'autre, vouloir le connaître, vouloir passer du temps avec lui. Et ne pas être aimé en retour, c'est la pire des souffrances !